La fermeture des voies sur berges de la rive droite de la Seine à Paris était pavée de bonnes intentions : améliorer le cadre de vie en ouvrant une promenade piétonne sur un espace emblématique de la Capitale, inciter les usagers à envisager des alternatives aux déplacements motorisés individuels, réduire la pollution atmosphérique et sonore. Mais le caractère louable et légitime des intentions qui peuvent animer l’action administrative n’en garantit jamais la légalité.

Le Tribunal administratif de Paris l’a rappelé le 21 février 2018 en annulant la délibération du Conseil de Paris du 26 septembre 2016 « déclarant l’intérêt général de l’opération d’aménagement des berges de la rive droite de la Seine » et partant, l’arrêté municipal subséquent du 18 octobre 2016 fondé sur l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales, portant fermeture à la circulation automobile de la voie Georges Pompidou et création d’une promenade publique.

Deux critiques sous-tendent principalement cette annulation.

La première tient à la préparation insuffisante de la mesure d’interdiction d’accès aux voies sur berges. Le Tribunal administratif a relevé que l’étude d’impact réalisée en amont de l’enquête publique comportait des inexactitudes, des omissions et des insuffisances concernant les effets du projet sur la circulation automobile, les émissions polluantes et les nuisances sonores. La Ville de Paris était d’ailleurs consciente de ces insuffisances dès lors qu’elles avaient été soulignées tant par l’autorité environnementale dans son avis du 10 mai 2016, que par la commission d’enquête publique qui avait émis un avis défavorable au projet le 8 août 2016. Ces critiques relatives au manque de préparation du projet de fermeture des voies se sont avérées fondées : dans un rapport de novembre 2017 le Comité régional de suivi et d’évaluation des impacts de la piétonisation des voies sur berge rive droite à Paris dressait, en dix points, un bilan particulièrement négatif de la mesure au regard de la circulation, des temps de parcours, de la qualité de l’air ou encore de la pollution sonore.

La seconde critique, tout aussi inévitable que la première, tient au fait que l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales n’autorise pas un maire à interdire de façon permanente l’accès à certaines voies mais uniquement à interdire cet accès à certaines heures, « eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l’environnement ». La mesure était donc entachée d’une erreur de droit.

Il n’est pas exclu que, pour des raisons politiques et d’opportunité, la Ville de Paris décidera d’interjeter appel, lequel n’aura néanmoins pas d’effet suspensif : les voies sur berges devront être rouvertes à la circulation. Il reste que le message du Tribunal administratif est clair, la Ville est invitée à revoir sa copie.

 

21 février 2018  | Matthieu Ragot