Deux semaines après l’annulation par le tribunal administratif de la fermeture à la circulation des voies sur berges, la maire de Paris a signé un nouvel arrêté portant réglementation de la circulation sur les Berges de Seine Rive droite à Paris, 1er et 4ème arrondissements, publié le 8 mars 2018.

Le 21 février 2018, le tribunal administratif de Paris annulait l’arrêté du 18 octobre 2016 portant fermeture à la circulation automobile de la voie Georges Pompidou et création d’une promenade publique.

Cet arrêté était fondé sur l’article L.2213-2 du code général des collectivités territoriales ayant trait « aux nécessités de la circulation et de la protection de l’environnement ».

Ont été sanctionnées par le juge administratif les faiblesses et insuffisances de l’étude d’impact réalisée en amont de l’enquête publique concernant les effets de la mesure sur la circulation, les émissions polluantes et les nuisances sonores.

La censure du juge a également et surtout porté sur le fait que l’interdiction générale et permanente de circulation sur les voies concernées était contraire aux dispositions de l’article L.2213-2 du code général des collectivités territoriales, qui n’autorisent l’interdiction de certaines voies de circulation non de façon permanente, mais uniquement « à certaines heures ».

Le récent arrêté pris par la maire de Paris se pare d’un nouvel habillage juridique et s’appuie, cette fois, sur des arguments patrimoniaux et touristiques, bien éloignés des considérations sanitaires et environnementales brandies pendant de longs mois et jusqu’à l’intervention du juge administratif.

Ce nouvel arrêté est en effet pris au visa des articles L.2213-4 et L.2512-14 du code général des collectivités territoriales, dont l’application combinée permet à la maire de Paris d’interdire l’accès de certaines voies ou portions de voies aux véhicules « dont la circulation est de nature à compromettre, notamment, la tranquillité, la protection des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques ou touristiques ».

A l’appui de ce nouveau fondement, l’arrêté se revendique notamment du soutien de l’UNESCO et mentionne ainsi que « les voies concernées par le présent arrêté ont été inscrites par l’UNESCO au patrimoine mondial en raison de l’exceptionnelle qualité et la grande diversité du patrimoine parisien », précisant même « qu’ainsi que l’UNESCO l’a constaté lors de la session de juillet 2017, l’interdiction des véhicules à moteur sur les quais bas des berges de la Seine contribue à préserver l’authenticité et l’intégrité du bien classé ».

L’écueil d’une interdiction à certaines heures seulement est ainsi évité, l’interdiction prise au visa des nouvelles dispositions invoquées pouvant être permanente.

Toutefois, ce nouvel arrêté n’est pas dénué de failles juridiques.

En effet, d’une part, le périmètre de la zone inscrite par l’UNESCO est beaucoup plus large que les voies concernées, contrairement à ce que laisse entendre le tout récent arrêté. Les « rives de la Seine » à Paris, inscrites en 1991 au patrimoine mondial de l’UNESCO, correspondent à la portion de la Seine comprise entre le pont de Sully et le pont d’Iéna (et jusqu’au pont de Bir-Hakeim pour la rive gauche). Couvrant 365 hectares, ce périmètre inclut 23 des 37 ponts de Paris et les îles Saint-Louis et de la Cité dans leur intégralité, mais également les Petit et Grand Palais, la Madeleine, le Champ de Mars, l’Ecole Militaire et les Invalides.

D’autre part, l’UNESCO n’a nullement lié le maintien du classement, ou pire encore, un éventuel déclassement (comme elle l’avait fait avec les éoliennes du Mont Saint Michel), à la suppression de la circulation sur les voies en cause.

A n’en pas douter, ce nouvel épisode fera l’objet d’un autre contentieux-fleuve…

 

15 mars 2018  | Anne Bost