A l’occasion de sa visite le 31 octobre 2017 à la Cour européenne des droits de l’homme, le Président de la République, M. Emmanuel Macron, avait annoncé son intention de déposer un projet de loi autorisant la ratification du Protocole n°16 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales[1].

Cette intention est désormais concrétisée : à la suite de la promulgation de la loi n° 2018-237 autorisant la ratification du Protocole n°16 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales le 3 avril 2018, la Ministre de la Justice, Mme Nicole Belloubet, a remis  au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe l’instrument de ratification du Protocole n°16 le 12 avril 2018. La France est le dixième Etat Membre à ratifier ce Protocole[2], permettant ainsi son entrée en vigueur le 1er août 2018 (Article 8 §1).

Ce Protocole met en place un mécanisme facultatif de consultation de la Cour européenne des droits de l’homme par les « plus hautes juridictions » nationales des Etats Membres sur « des questions de principe relatives à l’interprétation ou à l’application des droits et libertés définis par la Convention ou ses Protocoles. » (Article 1er §1). Par sa déclaration consignée dans l’instrument de ratification, la France a réservé cette saisine au Conseil d’Etat, à la Cour de cassation et au Conseil constitutionnel (Article 10).

De plus, les demandes d’avis consultatifs doivent intervenir dans le cadre d’affaires pendantes devant la juridiction nationale, qui doit motiver sa demande et produire les éléments pertinents du contexte juridique et factuel de l’affaire (Article 1er §2 et §3).

Un collège de cinq juges de la Grande Chambre sera alors chargé de se prononcer sur l’acceptation de la demande d’avis. En cas de refus, celui-ci doit être motivé (Article 2 §1). Lorsque le collège accepte la demande, la Grande Chambre rend un avis consultatif, qui est motivé et non contraignant (Article 2 §2, Article 4 §1 et Article 5).

Le Protocole n°16 offre un nouvel outil très précieux aux justiciables, qui devrait contribuer à renforcer l’effectivité de la Convention européenne des droits de l’homme sans qu’il soit nécessaire d’introduire un recours – souvent long – devant la Cour de Strasbourg. Un point procédural devra néanmoins être éclairci par la France avant le 1er août prochain : la demande d’avis pourra-t-elle être présentée devant un juge du fond, lequel décidera de la renvoyer ou non au Conseil d’Etat ou à la Cour de cassation, en vue de sa transmission à la Cour européenne, sur le modèle de la procédure applicable en matière de question prioritaire de constitutionnalité ? Ou faudra-t-il attendre un pourvoi pour présenter une telle demande ? Dans la seconde hypothèse, l’intérêt du dispositif s’en trouverait réduit.

 

[1] Le Protocole n°16 a été adopté le 10 juillet 2013 lors de la 1176ème réunion des Délégués des ministres du Conseil de l’Europe et est ouvert à la signature des Etats Membres depuis le 2 octobre 2013.

[2] Le Protocole n°16 a déjà été ratifié par l’Albanie, l’Arménie, l’Estonie, la Finlande, la Géorgie, la Lituanie, Roumanie, Saint-Marin, la Slovénie et l’Ukraine.

23 avril 2018  | Rafaela Choairy