Les statuts de SAS ont plus que jamais valeur de loi entre les associés, selon le revirement récent de la Cour de cassation.

La Cour de cassation, dans une décision qu’elle présente elle-même comme un revirement, a décidé de renforcer la valeur de la liberté statutaire dans les SAS, en rappelant que ce principe est essentiel au bon fonctionnement de la société et à la sécurité de ses actes.

L’article L227-9 du code de commerce permet aux SAS de déterminer librement dans leurs statuts les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés, dans les formes et conditions qu’ils prévoient. Néanmoins, dans certaines matières strictement énumérées, les décisions doivent obligatoirement être prises par la collectivité des associés.

Jusqu’à présent, seules ces décisions visées par la loi encouraient l’annulation en cas de violation des règles d’adoption. De jurisprudence constante, la Haute Juridiction estimait ainsi que, dans les sociétés commerciales, la nullité des actes ou délibérations ne pouvait résulter que de la violation d’une disposition impérative du livre II du code ou des lois qui régissent les contrats. Ainsi, le non-respect des stipulations contenues dans les statuts n’était pas sanctionné par la nullité (Com., 18 mai 2010, n° 09-14.855).

Jusqu’alors, la Chambre commerciale appliquait strictement cette jurisprudence aux délibérations prises en violation des clauses statutaires qui définissaient le champ et les conditions des décisions collectives au sein des SAS. Elles ne pouvaient donc être annulées (Com. 26 avril 2017, n°14-13.554).

Par un arrêt du 15 mars 2023, elle revient sur sa jurisprudence et juge désormais que « l’alinéa 4 de l’article L. 227-9 du code de commerce, institué afin de compléter, pour les sociétés par actions simplifiées, le régime de droit commun des nullités des actes ou délibérations […] doit être lu comme visant les décisions prises en violation de clauses statutaires stipulées en application du premier alinéa ».

La Cour de cassation justifie son revirement par la nécessité d’assurer le bon fonctionnement de la société et la sécurité de ses actes. Le pacte social entre les associés est en effet essentiel dans ce type de société et il était surprenant que sa violation ne soit pas sanctionnée par la nullité, limitant de fait la force de ces stipulations. Désormais, les statuts devront être vus comme la loi entre les parties, au-delà d’un simple accord dont la violation se résout par l’octroi de dommages et intérêts.

Solange Erambert
Avocate à la Cour